Le 14 juin dernier, la Suisse a été marquée par un mouvement social d’une ampleur extraordinaire et historique : la grève féministe. Des centaines de milliers de femmes se sont inscrites dans la vague de mobilisations ayant eu lieu en Pologne, en Argentine, dans l’Etat espagnol ou encore en Italie, et se sont mises en grève, au travail, au bureau, dans les commerces, à la maison. Cette pluralité d’expériences de la grève est une caractéristique fondamentale des grèves féministes : en la « sortant » des usines et la revendiquant pour le travail non salarié de reproduction sociale (ménage, soin des enfants, etc.), les féministes ont questionné une catégorie centrale du mouvement ouvrier : le travail.
Cet élargissement est salutaire et permet de perspectives de luttes et d’organisations, et ouvre plusieurs axes de questionnements : De quelles oppressions et exploitations les femmes sont-elles victimes ? Quelle est la nature du travail reproductif ? Sur quelles bases construire un mouvement féministe large ? Comment définir « l’ennemi principal » ? S’agit-il des hommes en tant que « classe », ou le système économique et politique en lui-même? Et donc, quels liens y a-t-il avec les organisations politiques de gauche et les syndicats?
Le Groupe Regards Critiques propose de discuter de ces enjeux dans son premier module thématique. Nos séances auront lieu les jeudis, de 16h30 à 18h30, en salle 2137 du bâtiment Géopolis à l’Unil (arrêt Mouline).
Le 26 septembre 2019, nous lirons des extraits du Manifeste d’un Féminisme pour les 99%, rédigé par Cinzia Arruzza, Tithi Bhattacharya et Nancy Fraser. Ce texte, qui s’inscrit dans la tradition politique développée par Marx et Engels, plaide pour une émancipation totale et globale, à partir d’une position résolument féministe.
Pour la deuxième séance qui aura lieu le 3 octobre 2019, nous proposons de lire des extraits d’une grande figure du féminisme marxiste avec Silvia Federici, qui, dans Caliban et la Sorcière notamment, a revisité certaines questions centrales du marxisme selon un point de vue féministe. Elle y montre notamment la manière dont le processus de formation du capitalisme – ce que les marxistes appellent l’accumulation primitive du capital – s’est accompagné, voire a nécessité, une très vaste entreprise de disciplinarisation et d’asservissement des femmes. Nous lirons des extraits de certains de ses articles, republiés récemment dans Le Capitalisme patriarcal.
Enfin, pour discuter de la situation suisse et internationale, nous aurons le plaisir de clôturer ce cycle le 10 octobre 2019, avec une table-ronde animée par Maria Pedrosa, et Tamara Knez?evic?, militantes féministes et syndicales ayant organisé la grève du 14 juin dernier.