Vingt Dieux de Louise Courvoisier est une tendre représentation du passage entre la naïve insouciance de l’adolescence et la rude réalité de la vie d’adulte. Dans ce film rempli de champs interminables, d’accents authentiques, entourés de vaches et de fromage, nous sommes plongés dans la belle simplicité quotidienne de la campagne agricole dans l’atmosphère unique du Jura.
Mélangeant légèreté et profondeur, ce film nous montre l’évolution d’un adolescent de 18 ans, Totone, qui traverse un moment difficile. Forcé d’affronter la vie d’adulte, il découvre un amalgame de choses, du beau au dévastant. La force de l’amitié, qui peut créer des liens encore plus puissants que la famille ; la passion ainsi que la bêtise de l’amour de jeunesse ; faire face à la réalité du travail et commencer à se soucier de l’argent ; la perte ; la découverte de soi, etc. Grâce à ces thématiques auxquelles le spectateur peut s’identifier, il redécouvre tous ces éléments en même temps que les autres personnages, à travers une nostalgie douce-amère. Chaque moment de souffrance est contrebalancé par un moment d’allégresse. Tout cela crée une tendre sincérité, et met en avant le message simple mais efficace : « oui, la vie est difficile. Mais elle est belle, aussi, et mérite d’être vécue. »
Les couleurs saturées ajoutent à l’ambiance légère : rire avec ses potes, boire et danser. Les scènes sérieuses viennent créer un contraste avec cela en étant beaucoup plus sombres et ayant des couleurs davantage beiges, noires et grises. Une chose particulièrement bien faite est l’utilisation de la réapparition de certaines couleurs qui créent des associations dans l’esprit du spectateur. Le t-shirt rouge de Totone ou le jaune du fromage, par exemple, ressortent dans le film, faisant qu’on le constate dès le départ et qu’on le suit durant le film.
En outre, le son, ou devrais-je dire le manque de son, joue un rôle important dans Vingt Dieux . Nous avons des temps de musique, quelques dialogues accessibles et puis des moments de longs silences, perturbés uniquement par des sons particulièrement choisis, comme la respiration, des sons de travaux (vissage, grincement), vent, etc. Ce sont les vrais sons de la vie. Cette simplicité fait qu’on se sent comme si on assistait aux vraies vies des personnages. Ces moments nous laissent intérioriser les émotions et créer de l’empathie dans les moments plus sérieux et profonds. Les simples regards échangés deviennent beaucoup plus puissants, la souffrance prend forme, l’amour aussi. La musique, très bien choisie également, accentue cela et accompagne notre ressenti dans ces moments authentiques. De plus, les moments de silence sont cruciaux dans notre réalité, il faut les affronter pour pouvoir réfléchir et grandir, ce que nous montre très bien ce long-métrage.
En substance, ce film est un premier long-métrage très charmant de la part de cette cinéaste française. Non, ce n’est pas un film d’une profondeur ou complexité incroyable mais sa simplicité joue bien avec l’effet recherché et les thèmes mis en scène. Courvoisier a dit qu’elle voulait « montrer la campagne de manière sexy », et elle l’a très bien fait.
Sadika Gallo (11.12.2024)
Vingt dieux
- Réalisation: Louise Courvoisier
- Pays de production: France
- Genre: Drame
- Acteurices: Clément Faveau, Luna Garret, Mathis Bertrand
- Durée: 1h32