L’exorciste du Vatican – «ceci n’est pas un film»

© Sony Pictures Releasing Switzerland GmbH

Paraphraser le titre de l’œuvre de Magritte est la meilleure façon de décrire le fait que L’exorciste du Vatican, bien qu’il s’agisse d’un film, ce n’en est pas un. Pour quelle raison ? Tout simplement parce qu’il n’y a aucun élément qui soit cohérent avec les principes artistiques et communicatifs d’un film.

Théoriquement, il devrait s’agir d’un film d’horreur, mais en pratique, la mise en scène et le personnage interprété par Russell Crowe font de l’ensemble une soupe fade et sans saveur. Un film d’horreur qui n’est pas effrayant est un problème, tout comme un film comique qui n’est pas drôle. L’exorciste du Vatican réussit à échouer sur les deux fronts. En fait, il n’est pas possible de le classer dans la catégorie des films d’horreur, car la tension horrifique est inexistante, mais il n’est pas non plus possible de le classer dans la catégorie des comédies parce que les « blagues » et les « plaisanteries » ne correspondent pas au genre auquel le film aspire. Il n’y a pas non plus de jumpscares, normalement utilisés comme raccourcis par ces réalisateurs incapables de créer de la tension, mais qui souhaitent néanmoins effrayer le spectateur.

Il s’agit donc d’un film vraiment étrange, car on ne comprend pas la logique avec laquelle il a été écrit et tourné. Nous parlons d’un film où le protagoniste interprété par Russell Crowe joue le rôle d’un exorciste qui voyage en Vespa… De l’Italie à l’Espagne… Et où la première phrase qu’il prononce est « C’est un beau cochon ». Sans parler de sa façon de se comporter avec les nonnes qu’il rencontre … Bref, plusieurs éléments destinés (peut-être) à distinguer et caractériser le film, finissent par le transformer en un fatras sans personnalité, sans efficacité et vide de sens. 

Ce n’est donc pas un hasard si L’Exorciste du Vatican s’avère extrêmement vide et ne raconte rien que le spectateur puisse retenir ou sur quoi il puisse réfléchir. En somme, un film qui s’effacera de la mémoire en une après-midi.

Le peu qui est raconté dans le film se révèle paternaliste, faux et mystificateur. Il suffit de se référer à un dialogue où une des protagonistes du film, une Américaine, dit à sa fille que dans la région de l’Espagne où elles se trouvent, elle ne peut pas se promener en short. L’origine de ce discours provenant des Etats-Unis, pays parmi les plus bigots et conservateurs, ce dialogue semble presque comique. Mais comme nous l’avons déjà souligné, il s’agit bien d’un humour involontaire et accidentel.

L’Exorciste du Vatican essaie donc de juxtaposer deux genres très complexes à maîtriser séparément, encore moins dans le même film, et échoue sur toute la ligne. De surcroît, le fait que l’épilogue du film suggère qu’il veut ouvrir les portes d’un univers comme celui de Marvel, laisse légitimement croire que dans ce méli-mélo ont été insérés des éléments sans trop réfléchir sur leur pertinence et leur cohérence, dans le seul but d’émuler la formule du blockbuster pour tenter d’atteindre plus succès.

En conclusion, le pire et le plus dérangeant c’est que des gens ont investi de l’argent pour concevoir et produire un tel film, au lieu de financer d’autres ouvrages, plus méritants ou ayant quelque chose à dire et à apporter. Sans parler du fait que des films comme celui-ci ne font que détruire la beauté et la puissance d’un genre comme l’horreur, en le désacralisant et en lui faisant perdre son identité qui d’ailleurs peut offrir beaucoup, mais dont le potentiel n’est malheureusement pas suffisamment exploité. Hélas, il est beaucoup plus facile et plus rentable de créer des produits vides, suivant une logique purement commerciale, plutôt que d’essayer de transmettre quelque chose d’enrichissant au spectateur.

Jacopo Greppi


L’exorciste du Vatican
Titre original: The Pope’s exorcist
Réalisation: Julius Avery
Scénario:  Michael Petroni & Evan Spiliotopoulos
Interprètes: Russell Crowe; Daniel Zovatto; Alex Essoe; Franco Nero
Durée: 104′
Pays: Etats-Unis
Sorties romande: 10.05.2023