Chers amis de l’ORPHI,
Jeudi 11 décembre 2014, l’ORPHI a rencontré M. Michael Groneberg, MER en philosophie, pour le dernier « dîner » avec les enseignants de la section de ce semestre.
Le premier point abordé a été celui des Maîtres de la Caverne. Association uni(l)versitaire créée en 2011 par M. Groneberg, les Maîtres de la Caverne ont pour vocation de répondre au désir d’étudiants de s’exprimer par d’autres moyens que l’écriture théorique. L’association vise à permettre la réalisation de projets liés à la philosophie, au cinéma, à l’art et à toute autre forme d’expression de la pensée par différents médias: films, pièces de théâtre, mises en scène diverses, etc.
C’est en 2009 que M. Groneberg, suite à un séminaire sur Platon où se pose la question de la mise en scène du texte, commence à réfléchir au problème. Sa solution sous la forme de la mise en place d’une association spécifiquement dédiée à cet égard voit le jour deux ans plus tard.
La création d’un nouveau poste de MER par la direction qui a pour tâche de poursuivre ces activités, a permis à M. Groneberg, une « libération de la réduction à la philosophie antique ; ils ont aussi permis une ouverture à de nouvelles façons d’exprimer la pensée. Pour nombre de participants au projet, l’association représente la possibilité de s’approprier la philosophie de manière vraiment personnelle.
M. Groneberg propose pour l’heure deux types de séminaires: orientés vers les Maîtres de la Caverne ou non. Une première question a concerné l’évaluation des travaux d’étudiants présentés dans ce cadre: comment en effet juger de la qualité d’un projet artistique? M. Groneberg a répondu que deux critères entraient en ligne de compte: la question de la forme et celle du contenu. En tant qu’enseignant de philosophie, M. Groneberg se charge d’examiner le contenu du projet, qui seul entre en compte pour la validation; les étudiants reçoivent une appréciation sur la forme de leurs projets par des professionnels du monde des arts (cinéma, théâtre, etc.). En outre, les étudiants doivent consigner leurs réflexions quant à leurs travaux dans un « journal de bord », qui permet ainsi un contrôle externe sur l’évolution du projet.
La discussion s’est orientée vers le parcours de M. Groneberg. Autrichien d’origine, le jeune M. Groneberg, désireux d’étudier à la fois la physique et la philosophie, s’oriente tout d’abord vers des études bi-disciplinaires à Munich. Mais, vite déçu par le caractère froid des études de physique, il se tourne entièrement vers la philosophie, non sans se poser la question de savoir ce qu’il pourra bien faire à la suite de ses études. Il cherche à renouer à Francfort et Tübingen avec son intérêt pour la physique, mais en vain. Il rentre alors à Munich, où il entreprend des travaux sur le concept de survenance. Part ensuite au Canada pour des raisons personnelles, avant de revenir à Berlin, où, arrivé au stade du doctorat, il se prend de passion pour la question du déterminisme et de la liberté et décide d’écrire sa thèse sur le sujet. Il commence sa thèse en 1990, au moment de la réunification des deux Allemagnes – temps excitants, où il est bien difficile de se concentrer sur son travail qu’il termine pourtant en 1994. Bien que son directeur de thèse, tenant de la philosophie analytique, soit « formidable », il s’éloigne pourtant de cette dernière, déçu du manque de contextualisation historique de l’approche analytique.
Il se tourne alors vers la philosophie antique, avant d’être appelé pour donner des cours de logique à Fribourg. Soutenu par le philosophe suisse Alexandre Jollien, il y enseigne la logique aux étudiants en philosophie de première année. Y rédige sa thèse d’habilitation sur les « futurs contingents », travail logique et ontologique, qu’il termine en 2005, ce qui lui permet de diriger des recherches. M. Groneberg passe à Fribourg à sa « phase pratique » : tout en élaborant sa thèse d’habilitation, il commencer parallèlement à mener des recherches philosophiques plus pertinentes qui portent sur les questions du genre et de la sexualité.
Interpellé par la question du genre, l’enseignant de philosophie se lance dans des recherches sur le sujet: « Pourquoi la violence est-elle plus acceptable chez les hommes que l’homoérotisme? », se demande-t-il par exemple. Telle est sa « phase pratique », lors de laquelle il fait connaissance de Mme Alexandrine Schniewind, qui lui demandera, une fois professeure à l’UNIL, de venir enseigner à Lausanne. Non sans plaisir, il y découvre un univers de travail particulièrement ouvert d’esprit, ce qui lui permet d’en parler aujourd’hui comme sa troisième « phase », celle de la philosophie de l’art, concrétisée par la mise en place des Maîtres de la Caverne.
Romain Fardel